L’interview de rose-amélie
da cunha et claudia courtial, festival vogue la nuit
Crédits photo : Vogue La Nuit
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Rose Amélie et Claudia ont eu carte blanche et seulement quelques mois pour imaginer la direction artistique du Festival Vogue La Nuit qui aura lieu du 13 au 17 juillet 2022, dans le cadre des Nuits de Fourvière. Avec la participation des Subs – lieu de création artistique à Lyon consacré au spectacle vivant – et fortes de leurs expériences dans les musiques actuelles et les danses de la contre-culture, elles nous racontent leur binôme et leur programmation dont l’ambition est de proposer une expérience festive, participative autour de rencontres artistiques.
Claudia et Rose, pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Moi c’est Claudia. J’ai commencé à travailler dans les musiques actuelles en organisant des événements, des concerts et des festivals. J’ai aussi monté mon propre festival en Ardèche qui s’appelle Oh Plateau ! J’aimais beaucoup tout ce qui touche à l’accompagnement et à la coopération des acteurs culturels. Pour cela, j’ai travaillé à Auvergne-Rhône-Alpes Spectacle Vivant et à Grand Bureau, le réseau régional des musiques actuelles, pendant trois ans. J’étais chargée de mission accompagnement, notamment sur le dispositif iNOUïs du Printemps de Bourges et sur des programmes régionaux de repérage artistique.
Je me vois un peu comme une spectatrice professionnelle. J’ai toujours été assez fascinée par les artistes et j’ai voulu être à leur service et les mettre en valeur à travers l’organisation d’événements et de la programmation.
Mon projet est d’être indépendante et de pouvoir faire plusieurs missions qui vont de la programmation à l’accompagnement de projets. J’ai une démarche assez militante parce qu’on est dans un milieu où les problèmes d’égalité des genres sont bien là. J’ai d’ailleurs monté un collectif qui s’appelle Les Canutes à Lyon, qui propose des workshops pour les artistes, musiciennes femmes transgenres et non binaires.
Moi (Rose), je uis une passionnée de danse depuis toujours et je suis tombée dans les danses hip-hop il y a une quinzaine d’années. J’ai travaillé pendant 12 ans au développement du Festival Karavel et du Centre Chorégraphique Pole Pik en région lyonnaise. J’ai aussi travaillé au repérage et à l’accompagnement d’artistes issus plus largement des danses de la contre-culture (hip-hop, électro, waacking, krump etc.). Je suis ensuite partie à la Villette où j’ai coordonné le dispositif Initiatives d’Artistes en Danses Urbaines (IADU). Ensuite, j’ai eu envie de devenir indépendante, de continuer l’organisation, et l’accompagnement d’artistes, mais de façon plus libre afin de pouvoir multiplier les collaborations. Je suis rentrée dans une coopérative d’activités, je travaille avec l’Azimut en Ile de France sur la programmation de la danse et sur les Nuits de Fourvière avec Vogue la Nuit. Je rejoins aussi Claudia sur l’aspect militant, la question de la représentation des minorités dans le champ de la création m’importe beaucoup.
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Comment vous êtes-vous retrouvées toutes les deux à la direction artistique de Vogue La Nuit ?
(Rose) C’est Sophie Broyer, conseillère et programmatrice musique des Nuits de Fourvière qui a eu envie de booster deux femmes programmatrices car elle s’interroge elle-même sur la représentation des femmes dans le secteur de la programmation.
Il y a eu un appel à candidatures et tout un processus de recrutement. Ils ont vu beaucoup de points communs et de complémentarité entre nos deux profils. Moi (Claudia), je viens des musiques actuelles et Rose du spectacle vivant. Nous sommes également toutes les deux dans l’accompagnement et dans la recherche autour de la création et de ces contre-cultures. Nous avons aussi toutes deux la même façon de programmer avec des propositions participatives et très festives en danse – notamment en Waacking – et en musique.
L’idée de constituer un binôme était importante car il y avait cette notion de mentorat et de transfert de compétences de manière horizontale entre deux personnes. Il y a aussi un enjeu de soutien, la mission n’était pas évidente à réaliser seules. Aussi, notre esprit de sororité est un plus dans le bon fonctionnement de notre binôme.
“l’idée générale de cette programmation est d’aborder les différentes facettes de la fête ”
Vous avez eu carte blanche sur la programmation, comment l’avez-vous pensée ?
(Rose) Le temps était très limité. Nous avons initié le travail en janvier pour rentrer dans le dur de la programmation en février avec une résidence aux Subs. C’est là que le squelette Vogue La Nuit est né. Au démarrage, nous avons quand même pris le temps de se rencontrer et d’aller voir des spectacles ensemble.
Nous sommes entièrement libres dans la programmation. Ni la direction de Fourvière, ni la direction des Subs ne nous ont donné de directives artistiques. Nous sommes parties d’un moodboard avec des images et des noms qui nous parlaient. Il y avait des choses qui se recoupaient, qui résonnaient entre elles, qui se répondaient.
En ce qui concerne la danse, notre interrogation était de se dire comment voir de la danse d’une autre manière qu’en s’essayant dans un théâtre ? Comment peut-on vivre la danse différemment ? Cette question m’intéresse (Rose) depuis le début parce que j’aime particulièrement vivre les spectacles, j’aime participer. Je viens des arts de la rue donc il y a beaucoup cette dimension de participation. Un des premiers noms de la danse auquel on a pensé était celui d’Habibitch avec une proposition de conférence dansée. C’est une autre manière de toucher du doigt la danse parce qu’elle parle, elle danse et fait danser le public. Nous avons aussi programmé la Compagnie Madoki avec D.I.S.C.O qui est un spectacle en cours de création avec une version spéciale Vogue La Nuit ou le public va pouvoir danser.
L’idée générale de cette programmation, est d’aborder un peu les différentes facettes de la fête. Le premier soir est très burlesque, un peu Cabaret Music-Hall. Le deuxième jour, le 14 juillet, fête nationale, ambiance place de village, fête et danses traditionnelles. Le troisième jour, le focus est sur les origines des danses de clubs, le côté communautaire et militant et quatrième jour, les cultures électroniques sont mises à l’honneur à travers des DJ set, des lives électro et des performances de danse. Et le dernier jour, Block Party, 100% hip-hop.
Nous voulions collaborer avec des artistes émergeants, des communautés à qui on donne nous mêmes une opportunité et pour qui le festival peut-être un déclencheur. Notre volonté est de créer beaucoup de ponts afin de faciliter les rencontres artistiques. Tout est pensé pour être complémentaire, cohérent et que cela fasse caisse de résonance.
Je (Claudia) me suis demandée pendant très longtemps pourquoi dans la musique les gens dansaient si peu ? Le but de la musique est de créer quelque chose au niveau du corps, des émotions. J’avais vraiment envie d’enclencher des liens entre musique et danse. C’est une formidable opportunité d’inciter les publics des musiques actuelles à danser de manière active et participative.
La programmation danse Festival Vogue La Nuit :
Vendredi 15 juillet :
– Décoloniser le Dancefloor, Habibitch – 18h30 à 20h
– D.I.S.C.O, Cie Madoki – 20h30 à 21h30
Samedi 16 juillet :
– DJ Battle, Maud Le Pladec – 18h30 à 20h
– Lucie Antunes invite Kaori Ito – 20h30 à 21h30
Dimanche 17 juillet :
– Block Party, La Fougue – 11h à 17h
Comment vous sentez-vous après ces quelques mois à travailler sur Vogue La Nuit ?
Je (Rose) me sens remplie de danse parce que je n’en ai jamais vu autant en si peu de temps. J’ai l’impression de m’être reconnectée vraiment à la danse. J’ai parfois eu des doutes sur ma spécialisation en danse, et en fait oui, j’aime vraiment la danse j’adore ça.
Moi (Claudia), je me sens remplie de curiosité, boostée dans l’envie de découvrir toujours plus de choses et d’aller explorer des univers que je ne connais pas, sur la danse notamment. Je suis danseuse aussi, donc ça me donne envie d’aller voir des spectacles de danse, de me cultiver, d’aller toujours plus creuser artistiquement.
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Dorothée de CabisSole
Dorothée est la fondatrice du podcast Tous Danseurs.
Après une première vie professionnelle bien remplie, elle a décidé de mettre son énergie et ses savoir-faire au service de la danse.
Vivre ses rêves et être en mouvement.
Le beau, la culture, les arts vivants sont essentiels. Nous avons tous un rôle à jouer.
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